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Equipe de ligue CFD : record de Létanne battu par Guido Prestigiovanni



Ce 9 mai 2025, quelques pilotes de l'équipe de ligue se rendent à Létanne pour envisager un vol en direction de la Normandie. De très beaux vols ont pu être réalisés notamment par Guido qui passe les 300 km. Bravo également à Jonathan Mayan qui bat son record personnel (216 km). Un jeune pilote à suivre, c'est sûr ... Régis Fouret et Jean Claude Deturche s'illustrent très honorablement également (225 km et 223 km).
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https://parapente.ffvl.fr/cfd/liste/vol/20376458
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Guido nous raconte sa journée :
Il est 6h15 du matin sur l’A4, et devant nous, le soleil se lève doucement. On est en direction du décollage de Volmerange, si les conditions tiennent leurs promesses un axe au délà des 400km est jouable. Les prévisions annoncent un flux d’ESE soutenu, avec un gradient marqué au sol. La clé, ce sera de décoller avant que la convection ne vienne mélanger les couches.
Problème : on n’a toujours pas d’infos sur l’activation des zones d’Étain. Sans ça, l’axe depuis la frontière luxembourgeoise devient tout simplement irréalisable. Depuis hier, j’essaie de joindre la base, sans succès. Le doute s’installe.
Létanne semble une option plus sûre : une ligne un peu plus modeste, limitée par la TMA Rennes 4, ou, au mieux, jusqu’à la mer. Mais ça reste un beau projet : un 300+ qui risque de finir sur la côte.
Avec Frédéric Delbos, on glisse presque naturellement vers ce choix plus raisonnable. Létanne est plus proche, moins venté, la cumilification semble plus probable et quelques pilotes de la ligue vont nous rejoindre.
Du coup, on a largement le temps de s’arrêter pour un vrai petit déjeuner — je n’ai encore rien mangé, à 4 heures du matin, difficile d’avaler quoi que ce soit. On en profite aussi pour faire un détour par Stonne repérer le décollage.
Arrivés à Létanne, quelques locaux sont présents au déco. On prend le temps de discuter, d’échanger les premières impressions sur la journée. Étrangement, le vent est quasi nul. Mais pas pour longtemps. Les premiers cumulus commencent à se former vers le nord, et rapidement, le profil venté de la journée s’affirme.
Fred est déjà installé dans sa sellette et décolle. Je me vois contraint d’écourter les discussions avec les pilotes qui viennent d’arriver. La convection commence à s’installer, l’envie de décoller devient insoutenable.
Le rendement de la pente est excellent. En peu de temps, je rejoins Fred qui est déjà à une altitude confortable. On est rejoints par Loïc Marinhte, et les premiers déclenchements sérieux commencent à s’installer. Loïc décale déjà, alors que je temporise encore un peu avec Fred.
La cumilification gagne progressivement le décollage. Le deuxième cycle, l’invitation qu’on attendait. Le thermique est tonique, mais encore désorganisé. Ça bute à 1000 m, il faut recentrer. À 1200 m encore un recentrage. 1300 m, Fred a pris un peu de retard. Je ne suis pas encore au plafond, mais j’ai désormais une hauteur confortable pour aller chercher un système plus établi, mieux organisé.
11h30. Un +2,5 intégré commence à donner le ton de la journée. Le ciel est particulièrement lisible, alors que je perds Fred de vue. Je dois maintenant commencer à éviter la zone de Sissonne. Je viens de monter à 1800 mètres, juste au début d’une rue de nuages prometteuse. Je décide de continuer le long de l’alignement, puis de craber en sortie. Les enchaînements deviennent de plus en plus évidents. Le rythme du vol s’installe, régulier. La masse d’air est vraiment généreuse.
Il est 14h, au sud de Saint-Quentin et je suis à 2191 m. Je me retrouve à traverser une zone de champs inondés. Il faudra s’attendre à un coup de mou, mais j’ai suffisamment de hauteur pour tenter le passage.
À partir de là, le vol change de physionomie. Tout devient désorganisé. Ça monte très fort, mais dans des bulles étroites et nerveuses. Et ça descend tout aussi violemment tout autour. Accroché à ma voile, je me bats pour maintenir le profil en place. Tout devient plus instinctif, physique, et brutal. Je me fais littéralement tabasser, malmené par une aérologie qui ne laisse aucun répit. Je sais que ça n’est qu’une phase de vol. Il faudra juste tenir bon.
Ce sera la guerre jusqu’au sud d’Abbeville, où les étalements commencent à dessiner des gros nuages en forme de galette, mais espacés. Il y aura des pièges, mais c’est exploitable.
16h25, à 2191 mètres, le ressenti est glacial. Je pars en transition en remontant ma capuche par-dessus le casque — dans la précipitation du déco, j’ai oublié d’installer mon tour de cou en cagoule — j’ai étrangement froid au corps et pas spécialement aux mains. D’habitude, c’est l’inverse !
La masse d’air s’assagie et le visuel côtier s’ouvre à moi. Je commence à border la Côte d’Albâtre. Les transitions deviennent longues au-dessus de vastes zones d’ombre. Je descends inexorablement en visant une vallée perpendiculaire dans une zone ensoleillée. Bien orienté, cela pourrait me permettre de temporiser en soaring.
J’arrive avec 341 mètres sol et je ressens une aspiration claire sur le plateau derrière. Je décide de quitter le relief et de me laisser aspirer, malgré la faible marge. À 165 mètres sol, je touche un thermique : étroit, nerveux, mais bien vivant. Je me bats pour le centrer et, une fois dedans, en à peine sept minutes, je me retrouve propulsé à plus de 2000 mètres.
De nouveau gelé, j’aperçois un bateau partir depuis le port de Dieppe. Dans la dérive, le ciel se lave. Je n’ai plus qu’un résidu d’étalements devant moi. J’aperçois les boucles de la Seine et Rouen à ma gauche. Je devine l’estuaire de la Seine derrière la brume, qui estompe les reflets du soleil sur la mer vers le Havre.
En finesse, dans la dérive, j’estime pouvoir atteindre le bord de mer. Mais je choisis de rester sur l’axe le plus long. Il n’est que 18h, le ciel n’a pas encore dit son dernier mot. Ça pourrait encore rebondir.
Sous le résidu, ça zérote à peine, et je me rapproche rapidement de la TMA Rennes 4. Anticipant la nécessité de redescendre sous le plancher, je décide — peut-être un peu tôt — de partir en transition. Ce sera le dernier, le plané final.